🍇« Ce n’est pas un paysan qui se suicide, c’est un paysan qu’on assassine ». Les vignerons du collectif Viti 33 n’en peuvent plus de compter les morts.
La viticulture française est trahie par nos dirigeants et sacrifiée par l’Europe.
Voici mon courrier à Emmanuel Macron ⬇️
Monsieur le Président,
En mai dernier, c’est avec effroi que les Girondins ont appris le décès du viticulteur Christophe Blanc, 59 ans, qui a mis fin à ses jours à Saint-Magne-de-Castillon. Entre-temps, et malgré la vivacité des alertes de la profession, la situation n’a cessé de se dégrader. Depuis le 23 septembre, nous déplorons le suicide de Jonathan Mayer, vigneron de 37 ans à Saint-Hilaire-du-Bois.
Face aux difficultés d’écoulement des stocks, aux disparités normatives applicables entre pays concurrents, au manque de renouvellement des générations et au défi de la reprise des exploitations, le Rassemblement National, depuis des années, s’est grandement mobilisé pour alerter les gouvernements successifs sur la situation de l’agriculture française. Avec mes collègues du Rassemblement National membres du Groupe d’études Vigne, vin et œnologie à l’Assemblée nationale, nous usons de tous les moyens pour diffuser nos mesures plébiscitées par les praticiens, et sur lesquelles je reviendrai ultérieurement.
Par ce courrier, et au regard de mes relations constantes avec la FDSEA 33, les Jeunes Agriculteurs, la Coordination Rurale 33, les tribunaux de commerce, la Chambre d’agriculture, des collectifs tels que Viti 33 et de mon implantation dans un département viticole, je me fais le relais d’une profession à bout, asphyxiée par les contraintes, abandonnée par ses dirigeants et meurtrie par les suicides qui s’amoncellent.
D’une façon générale, je ne compte plus les témoignages de producteurs qui se sentent démunis, devant les épisodes de grêle, en raison des vignes en friche, ou encore qui éprouvent une grande désolation face à des gouvernements qui semblent les entendre sans les écouter, et devant une Union européenne qui feint de les soutenir alors qu’elle ne cesse de multiplier les accords de libre-échange devant les contestations généralisées des fédérations agricoles.
Contrairement à cette vision sacrificielle, nous soutenons constamment l’allègement des normes, l’arrêt des surtranspositions et des interdictions de substances sans alternative. À l’échelle de l’Union européenne, mes collègues du Rassemblement National se sont légitimement insurgés au début du mois contre la décision de la Commission de verser 15 millions d’euros de subvention à la viticulture sud-africaine, alors que le budget de la Politique agricole commune diminue de près de 30% en euros constants entre 2007 et
2027.
En outre, je déplore la versatilité des gouvernements successifs, prompts à s’offusquer au niveau national des conséquences de leurs propres compromissions au niveau européen.
À ce titre, les représentants français n’ont pas su défendre la filière viticole dans le cadre de l’accord avec les États-Unis, qui ajoute 15 % de tarifs douaniers aux vins français. Sur ce dossier, la ministre démissionnaire Madame Annie Genevard semblait faire oublier qu’elle faisait partie du Gouvernement (fruit d’une coalition entre les macronistes et LR) qui représentait la France devant les instances européennes. Ainsi, au début du mois d’août 2025, Madame Genevard a pu énoncer que « le Gouvernement est pleinement mobilisé dans les négociations pour défendre nos intérêts » viticoles, et réagir à la fin du même mois en considérant finalement que l’accord « porte atteinte aux intérêts français et européens en matière agricole ».
Partant, nous ne pouvons que regretter la communication fataliste de la part de la ministre démissionnaire, qui dresse le tableau de la multiplication des capitulations françaises de la « Ferme à la fourchette » au Mercosur, en passant par le récent accord douanier avec les États-Unis.
Ce « ministère du commentaire », ainsi que les agriculteurs de ma circonscription le qualifient, là aussi, tend à faire oublier que le parti de Madame Genevard a renouvelé le mandat de Madame Von der Leyen à la Présidence de la Commission européenne. De notre côté, les députés RN au Parlement européen, menés par leur Président Jordan Bardella, ont initié une motion de censure en réaction à la mise en application du Mercosur par ladite Commission.
D’un point de vue parlementaire, à l’Assemblée nationale, l’examen récent de la proposition de loi visant à lever les contraintes à l’exercice du métier d’agriculteur (dite « loi Duplomb ») a pleinement incarné toute la malveillance que la gauche est capable de déployer pour anéantir l’agriculture française.
Par de basses manœuvres d’obstruction, la France insoumise a déposé 827 amendements, et les Écologistes 1541 – dont certains prévoyaient cyniquement de faire entrer en vigueur le texte à l’année
2100…
L’objectif de la gauche était clair : empêcher l’examen du texte, alors que sur le terrain les producteurs demandaient simplement une harmonisation des règles qui leur sont applicables. Heureusement, le Rassemblement National était là pour contrer cette offensive, et a permis l’approfondissement du débat et son adoption par la réunion d’une commission mixte paritaire avec les sénateurs – avant que son application ne soit entravée par le Conseil constitutionnel, au demeurant saisi par les députés de gauche, déterminés à saboter notre viticulture et à l’enterrer définitivement dans le jeu de la concurrence internationale.
En l’état, les professionnels assistent, médusés, à l’importation massive de produits traités à l’étranger avec des substances interdites en France – et parfois autorisées dans l’Union européenne comme l’acétamipride. Ils sont abasourdis par la poursuite de ces politiques contestées par le Rassemblement National, par l’effet desquelles la France importe et commercialise des aliments que nos agriculteurs sont interdits de proposer – alors que le vignoble français fait partie des vignobles les plus vertueux et engagés en matière environnementale.
En outre, l’examen de la loi Duplomb n’a constitué qu’une bataille spécifique dans l’axe cardinal de la gauche en la matière, à savoir une guerre contre le corps agricole français menée à la fois en commission et en séance publique à l’Assemblée nationale. Au milieu des communiqués de presse, des questions écrites et des propositions de loi, mon groupe politique a permis d’empêcher l’adoption d’amendements mortifères pour la viticulture, destinés à multiplier les taxes désincitatives à la consommation :
– Pour exemple, lors des discussions sur le PLFSS pour 2025, la gauche a déposé une série d’amendements hautement préjudiciables pour la viticulture française, qui ont pu être rejetés uniquement grâce à la mobilisation vigoureuse de notre groupe politique, puisque le bloc central, soit était absent, soit les soutenait, soit les rejetait avec frilosité.
* Un amendement socialiste proposait de supprimer le plafonnement de l’évolution du prix de l’alcool à 1,75 % par an, ce qui aurait conduit à indexer la taxation sur l’inflation et à une fois de plus grever le revenu des viticulteurs.
* Un autre soutenu à la fois par la France insoumise et les socialistes prévoyait d’instaurer une taxe de 3 % sur la publicité pour l’alcool au-delà de 10 millions d’euros de chiffre d’affaires.
* Dans le même élan, les socialistes, les communistes et les écologistes ont souhaité étendre la « cotisation sécurité sociale » à tous les alcools dont le vin (alors qu’elle est aujourd’hui réservée aux alcools titrant à plus de 18 %).
– À cela s’ajoutent les innombrables velléités de détruire les traditions culinaires françaises, comme lorsque la gauche proposait déjà en avril 2023 par voie d’amendements de réduire de 50 % la consommation de viande dans les cantines ou d’imposer des menus végétariens sans alternative – au détriment de nombreux élèves de famille précaire qui ne peuvent parfois pas bénéficier d’une bonne alimentation carnée à la maison.
Alors que les agriculteurs sont sacrifiés à Bruxelles, abandonnés à Paris, ils reçoivent le coup de grâce avec la région Nouvelle-Aquitaine. Cette présidence socialo-communiste a décidé sous ce mandat d’engager 200 000 € pour, notamment, accélérer la transition énergétique de la viticulture roumaine, en plus des 600 000 € accordés en partie pour l’agriculture vietnamienne. De surcroît, elle a instauré dans le cadre d’un programme intitulé « Néo Terra» un principe d’éco-socio-conditionnalité, éminemment excluant pour l’immense majorité des agriculteurs.
Au niveau local, dans mon département, à Gironde-sur-Dropt, c’est encore une cinquantaine de postes au sein de l’entreprise Yvon Mau qui ont été supprimés cette année à cause de l’arrêt définitif de l’activité de l’unité d’embouteillage. Sur un autre sujet mais qui demeure connexe puisqu’il concerne la souveraineté alimentaire, l’abattoir de Bazas, déjà menacé par le passé, vient d’annoncer sa fermeture.
Par-delà les mesures mortifères qui assaillent les agriculteurs, ces derniers sont confrontés, en plus de l’agribashing de la gauche décroissantiste et du centre complice, au mépris des institutions.
Je tiens ici à vous rappeler la violence psychologique ressentie par les exploitants bovins et laitiers français quand la Cour des comptes prescrivait dans un rapport de mai 2023 de réduire le nombre de cheptels pour diminuer notre empreinte carbone… Cette stigmatisation a pris un nouveau degré d’intensité quand un représentant syndical de l’Office français de la biodiversité a comparé les agriculteurs à des « dealers » en janvier dernier. Un apaisement de la situation aurait pu se produire grâce à l’initiative parlementaire de ma famille politique de supprimer l’OFB, mais le bloc central et les groupes de gauche s’y sont opposés en avril 2025. Sur le plan bancaire, les exploitants sont régulièrement confrontés à la violence des saisines qui s’opèrent jusqu’au découvert autorisé, mais aussi à l’accumulation des pénalités, au fichage auprès de la Banque de France et à une pression financière continue. Cette violence a pris un nouveau tournant en janvier 2024, lorsque des agriculteurs français se sont retrouvés en garde à vue devant le monde entier tandis qu’ils criaient pour leur survie.
Contrairement à ces palinodies, ma famille politique a toujours œuvré pour notre agriculture et exprimé son soutien, comme l’indique la lettre de Marine Le Pen aux agriculteurs de décembre 2024 ou celle de Jordan Bardella lors des manifestations d’agriculteurs quand Monsieur Gabriel Attal était à Matignon. À rebours de ces renoncements, le Rassemblement National se présente avec une série de mesures publiques, à disposition de tous et de bon sens pour soutenir la vigne et l’agriculture françaises :
– Exclusion de l’agriculture des traités multilatéraux de libre-échange,
– Réserve de l’accès aux terres agricoles aux agriculteurs et opposition à leur accaparement par des groupes étrangers,
– Amélioration du pacte Dutreil avec une exonération totale des droits de succession si garantie de non-revente pendant une période de 10 ans,
– Interdiction des importations de produits agricoles ne respectant pas les normes de production françaises et application des clauses-miroirs,
– Fiscalité raisonnable et stable sur le GNR,
– Modification des lois EGalim 1 et 2 pour permettre l’intervention de l’État dans l’élaboration des indices utilisés pour fixer des prix minimums et pour garantir le respect de ces dispositions par les industriels de la grande distribution,
– Étalement du remboursement des PGE,
– Inclusion des dégradations volontaires (activisme, rave parties, vols, saccages) dans les dispositifs d’urgence préfectoraux (procédure accélérée et avance de FranceAgriMer),
– Réserve de la commande publique aux alcools français pour favoriser le localisme,
– Interdiction d’utiliser des vins et spiritueux étrangers lors des réceptions de l’État, des ambassades et des collectivités territoriales,
– Accompagnement des repreneurs via les dispositions du rapport Girardin (guichet, recherche de repreneurs avant la succession, incitations fiscales),
– Soutiens ciblés pour aider les viticulteurs à accéder à de nouveaux marchés,
– Négociation avec les partenaires internationaux pour réduire les droits de douane et faciliter la circulation des vins français,
– Promotion de la certification « Origine France » pour renforcer la valeur perçue du produit,
– Assouplissement de la législation stigmatisante pour le vin (loi Évin).
Transversalement, nous demandons l’application de la loi EGalim à la viticulture, une réelle lutte contre la concurrence déloyale et la fin des importations massives (notamment de vins espagnols ou italiens dans le Bordelais alors que nos stocks s’accumulent), l’assouplissement des réglementations en matière de produits phytosanitaires, des solutions sur l’arrachage et la distillation, la fin de la diabolisation du vin et des politiques anti-alcool mal ajustées ainsi qu’un fort soutien à l’export. Il est temps de mettre un terme à la stigmatisation des viticulteurs, à la culpabilisation des consommateurs et aux positions ambivalentes d’un ministère de l’Agriculture qui prétend défendre la viticulture et d’un ministère de la Santé qui soutient le « Dry January » sans nuances.
Enfin, j’ai en septembre de nouveau échangé avec le collectif Viti 33 au Pian-sur-Garonne et des vignerons à bout, qui, désœuvrés et abattus, clament : « ce n’est pas un paysan qui se suicide, c’est un paysan qu’on assassine ». Las d’entendre à chaque Salon de l’agriculture les mêmes annonces suivies des mêmes désillusions, cellule de crise après cellule de crise, les professionnels continuent de déplorer la persistance des doubles-discours.
Les agriculteurs de France méritent la considération qu’ils demandent, et les viticulteurs notamment de la Gironde viennent de recevoir une nouvelle cause de consternation avec cet événement. C’est pourquoi je prends soin de vous alerter sur l’intensité de la crise autant morale que matérielle qui noircit la vigne française, et qui n’est encore une fois pas une fatalité, mais la conséquence naturelle d’une suite de renoncements, d’assauts contre nos traditions et de décisions inopportunes.
Nos vignerons attendent de la reconnaissance et des mesures concrètes, et j’espère que vous saurez leur proposer les deux dans un prompt délai.
Enfin, je vous prie de bien vouloir recevoir, Monsieur le Président, l’expression de ma plus haute considération.